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Droits de l´homme et orientation sexuelle

ngoCHR Online News (http://www.ngochr.org/)
24 April 2004
Cécile Parry (ICVolunteers)
Prendre conscience des discriminations et des problèmes auxquels doivent, en permanence, faire face les couples homosexuels et transsexuels ainsi que leurs enfants, pour que cessent les préjugés et que chaque famille soit reconnue au travers de ses qualités humaines et non plus en fonction de son orientation sexuelle. Tels furent les revendications ou problématiques soulevées lors de la table ronde organisée par IRCSM (The International Research Center on Social Minorities) et ISHR (The International service for Human Rights).

« Je suis mère de deux enfants, et je suis lesbienne » C´est sous cette lumière, des plus personnelles, que Me Kim Vance, présidente de l´organisation Arc International (Canada), ouvra la conférence. En guise d´introduction, elle mit en évidence le fait que, sur les scènes sociales, politiques et juridiques contemporaines, les discriminations infligées aux familles dites  « non-conventionnelles » sont plus que jamais d´actualité et qu´il était temps de d´intervenir et de s´accorder pour faire progresser les droits de ces personnes et de leurs enfants au-delà de la traditionnelle hétéro normalité. Une fois les bases posées, la parole fut offerte au premier iintervenant.

M. Jaap Doek, président du Comité des Nations Unies sur les droits de l´enfant, mit d´amblée l´accent sur le manque de considération flagrante dont font preuve les institutions aux sujet des enfants issus et élevés au sein de « familles alternatives ». Le préambule de la Convention sur les droits de l´enfant met en avant l´idée que la famille est la cellule ou la structure humaine fondamentale de tout fonctionnement social et l´environnement privilégié des enfants au sein duquel doivent régner entente et harmonie.

Cependant, M. Doek déplora que la réalité soit parfois bien loin de calquer sur les termes que l´on peut lire dans cette convention. L´homosexualité est de plus en plus reconnue dans certains pays où le mariage, l´adoption et les inséminations artificielles sont autorisés aux couples homosexuels, leur accordant, du même coup, le droit de fonder une famille unie par des liens de respect et d´amour. Cependant, cet intervenant nous fit remarquer que le modèle le plus largement admis, dès qu´il s´agit de l´éducation des enfants, est l´hétérosexualité ou bien, à la limite, la monoparentalité. Partant de la, il existe toujours une réticence certaine à tolérer qu´un enfant puisse être élevé de façon équilibrée par deux parents du même sexe. Certains éléments se doivent d´être pris en compte, d'après lui, afin de prendre du recul par rapport à cette conception, car rien ne prouve que les séparations, les abus, lles violences, etc. soient des caractéristiques propres uniquement aux milieux homosexuels. En effet, et c´est là dessus que conclut M. Doek, le sexe ne devrait plus être considéré comme un facteur déterminant de l´équilibre et de la qualité de l'éducation des enfants.

Le relais fut passé à une intervenante tout à fait particulière, la jeune Eleanor Whittle. Du haut de ses onze ans et au travers d´un bref récit de vie, elle sut illustrer et apporter de la crédibilité au thème de cette conférence. Elle pris la parole de la façon suivante : «  Mon père est un transsexuel et ça ne me pose pas de problème sauf quand on se moque de moi et qu'on me fait des blagues à l´école ». Elle ajouta ensuite: «  il est important que ces insultes arrêtent, ça me met parfois mal à l´aise et j´aimerais que tout le monde reconnaisse que nous sommes une famille ordinaire bien qu'il n´y ait simplement pas de mot pour nous décrire vraiment »

C´est ensuite au père d´Eleanor, Stephen Whittle, co-président de l´organisme britannique Press for Change, de prendre la parole. Lui aussi, après avoir rapidement fait référence à sa situation familiale, proposa de reconsidérer la définition que l´on se fait de la famille, qu'il perçoit en tant que « Unité sociale de personnes vivant ensemble et symbole de reconnaissance mutuelle dans un espace temporel et géographique ». Cependant, ses propres expériences et ses fonctions l´ont contraint à faire face à de multiples désagréments et à se poser des questions telles que : Dans un couple homosexuel ou transsexuel, en cas de décès, qui hérite des biens ? Quel sexe inscrire sur les certificats de décès ? Et bien d´autres encore, l´idée étant finalement que les droits de la famille et de l´enfant, découlant du modèle hétéro normatif et monogame reconnu en occident engendrent des lois sur la retraite, les héritages, l´éducation qui ne sont pas applicable pour un grand nombre de personnes contraintes de subir la tradition. Pour conclure il ajouta : « Les familles comme la mienne, non hétérosexuelles, devraient être juridiquement reconnues ». En d´autres termes, les rôles et les potentialités d´une famille devraient être revues par le droit afin que les intérêts suprêmes et fondamentaux des enfants puissent être réévalués et reconnus dans les différents cadres familiaux quels qu´ils soient.

La Nigérienne, Me Dorothy Aken´ova, représentant le Centre international pour la santé relative à la reproduction et aux droits sexuels, basée dans le Nord du Nigeria, fait, elle, plus particulièrement référence à ses propres observations et expériences faites sur le terrain nigérian. En effet, d´après elle, la discrimination sexuelle y est très vivace dans des lieux tels que l´université et les espaces publiques de soins. Cependant, à l´inverse des pays occidentaux, comme il a été explicité plus haut, la famille nigériane peut prendre beaucoup de formes et toutes sont traditionnellement légitimées par les deux religions nationales, le Christianisme et l´Islam au travers de leur tradition abrahamique commune dans laquelle Abraham, lui –même, avaient plusieurs femmes et plusieurs concubines. « Adam et Eve au jardin d´Eden ne sont pas la seul référence à laquelle il faut faire appel lorsqu´il s´agit de définir les comportements familiaux et sexuels ». D´après Me Aken´ova, pour ne pas tomber dans le piège de la fiction de ceux qui parlent en terme de « vraie famille », il faut absolument entreprendre des démarches de sensibilisation juridique et politique aux niveaux  communautaire, national et international.

Enfin, M. Meurers, accompagné de son fils, Christian Meurers, de quinze ans, prit la suite et expliqua pourquoi, lui-même homosexuel marié, il créa, en Allemagne, son organisation appelé KLECKS . Pour lui, il est très important que des personnes qui subissent des discriminations à l´égard de leur sexualité, puisse se rencontrer et échanger leurs expériences, le but étant toujours d´effectuer un travaille de sensibilisation et faire comprendre que les couples homosexuel, ou « arc en ciel » , comme il les nomme, sont capables d´être parents au même titre que les couples hétérosexuels. Christian, après avoir surmonté son embarras et ses préjugés premiers, exprima la chose suivante : « Il n´y a aucune différence si ce n´est que j´ai deux pères et au delà des limites de cette famille j´aimerais que quelque chose se passe au niveau de la législation en Allemagne ».

Les représentants de ces organisations de défense des droits aux orientations sexuelles, d´horizons, fonctions et âges si différents, étaient finalement tous réunis dans le cadre de cette conférence pour concevoir, agir et faire entendre, à l´unisson, la voix de la tolérance et du droit fondamentalement humain d´appartenir à une famille et ce, quel que soit l´identité sexuelle que chacun de ses membres choisi de revêtir. 



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